Conservation-restauration
tableaux et icônes

Kiriaki Tsesmeloglou

L’application du code de déontologie à un cas concret

Article du Pôle Patrimoine 29/07/2021

L’application du code de déontologie à un cas concret

Extrait d’un article "Regards croisés" du Pôle Patrimoine des Pays-de-la-Loire

Évoquons ensemble le portrait de Charles Harrouys, maire de Nantes de 1588 à 1589. Le tableau a été lacéré pendant la Révolution en application de la loi du 24 octobre 1793 (3 brumaire an II), car il portait des symboles aristocratiques.

Portrait de Charles Harouys restauré à Nantes

Afin de pérenniser l’œuvre, elle a été rentoilée (on a renforcé la toile lacérée par une nouvelle toile au revers), mais le conservateur-restaurateur [1], en concertation avec le conservateur ayant le contrôle technique et scientifique de la collection [2], a fait le choix de ne pas occulter les lacérations aux yeux du public par le biais d’une réintégration esthétique.

Ainsi, les lacérations sont stabilisées par le traitement d’un support et la pose d’un enduit au niveau des lacunes, mais restent discernables lorsqu’on est devant l’œuvre au château des ducs de Bretagne, musée d’histoire de la ville de Nantes.

Non seulement le protocole de conservation-restauration a pris en compte la signification esthétique, historique et l’intégrité physique du bien culturel, mais, en plus, il a pris en compte le contexte d’utilisation sociale, c’est-à-dire le contexte dans lequel l’œuvre est exposée. Si le tableau avait été exposé dans un musée des beaux-arts, le choix aurait peut-être été de ne pas laisser les lacérations visibles. Mais comme il s’agit d’un musée d’histoire, le choix a été fait, en toute indépendance mais de concert avec spécialistes et conservateurs, de laisser visible l’histoire de l’objet comme témoin de celle de la ville de Nantes.

C’est en cela que le choix de présentation esthétique d’un objet constitue un acte muséographique. Évidemment, ce choix n’est pas définitif, c’est pourquoi tout travail réalisé doit être totalement réversible.

1. Kiriaki Tsesmeloglou, conservatrice-restauratrice d’œuvres peintes
2. Bertrand Guillet, conservateur-directeur des Ducs de Bretagne